Des réponses aux questions actuelles
Traduction : Marie-Christine Peixoto et Laurent Strim
Nous pouvons penser — ou même espérer — que la pratique bouddhiste nous aidera à chasser les émotions désagréables afin de ne pas avoir à les ressentir. Désolé, mais les émotions font partie de l’être humain ! Cependant, elles ne doivent pas causer autant de souffrance.
Presque toujours, les émotions agréables et désagréables sont une réaction à quelque chose. Sharon Salzberg, professeur de méditation vipassana, dit que l’émotion est la façon dont notre conscience est liée à un objet, tangible ou intangible. Parfois, nous voulons nous accrocher aux émotions et leur céder ; d’autres fois, nous voulons les supprimer et faire comme si elles n’existaient pas. Céder aux émotions et les supprimer sont deux formes de désir qui, en réalité, alimentent l’émotion. Le Bouddha a enseigné que les gens qui ne sont pas éveillés passent leur vie à être ainsi tiraillés, par le désir et l’aversion, et nos émotions sont les ficelles.
Mais même si nous ne pouvons pas désactiver nos émotions, nous pouvons travailler à les relâcher et à nous libérer de leur contrôle. Par la pratique, nous pouvons atténuer nos réactions et apprendre à accepter nos émotions. Le bouddhisme enseigne que l’un des moyens les plus fondamentaux pour y parvenir est la pratique de la pleine conscience. Lorsqu’une émotion surgit, il faut la reconnaître sans la juger. Vous pouvez même lui coller une étiquette — la peur. La colère. Le regret. Le désir. Peu à peu, vous commencerez à remarquer que vos émotions sont liées à des réactions habituelles. Accepter les émotions, plutôt que d’y céder ou de les étouffer, leur permet d’apparaître et disparaître. Avec la pratique, nous pouvons nous détacher de nos anciens schémas et réagir plus librement aux circonstances.
Les émotions sont parfois décrites comme des obstacles à l’éveil. Mais d’autres enseignements, en particulier ceux de la tradition Mahayana, soulignent que travailler avec elles de manière consciente peut être un moyen habile (upaya) d’atteindre l’éveil, de sorte que nous pouvons peut-être prêter attention à ce qu’elles nous disent. Par exemple, un enseignant bouddhiste pourrait conseiller de ne pas essayer de réprimer une poussée de colère à cause de la pensée : « C’est mauvais d’être en colère », et de ne pas s’y accrocher ou la justifier non plus. Essayez plutôt de vous demander d’où vient cette colère. Si vous êtes en colère parce que quelqu’un a bousculé votre ego, alors le problème est l’ego, et non la colère ou la personne qui est l’objet de la colère. C’est une leçon importante à tirer.
Une émotion pénible, telle qu’un chagrin profond, peut rester longtemps en vous, et notre première réaction est souvent d’essayer de nous distraire ou de nous engourdir. Pourtant, si nous avons le courage d’accepter une émotion pénible — ou de demander de l’aide aux autres — la guérison peut commencer.
Issu de tricyle.org.
Cet article est paru dans Sagesses Bouddhistes n°13 ( printemps 2020 )