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Photo du rédacteurSagesses Bouddhistes

Ce qui traverse les existences

Suivi d'un court récit de Mark Epstein

©Ravi Sharma

Thanissaro Bhikkhu est abbé du Metta Forest Monastery.

L’idée d’une renaissance répétée pourrait sembler être un exemple extrême de création d’un sens du soi. Après tout, il y a beaucoup de « je » dans le fait de penser : « Si je dois survivre à la mort, je devrais prévoir la façon dont je vais renaître, et le lieu. » L’acte de faire l’hypothèse de la renaissance constitue cependant aussi une leçon importante parce que vous ne pouvez pas penser que vous pourrez tout emmener avec vous. Vous devrez laisser derrière vous une grande partie de ce qui est actuellement « vous » et « à vous ». Vous devez donc vous focaliser attentivement pour apprendre ce que vous pouvez et ne pouvez pas emmener avec vous. Les choses que vous ne pouvez pas emmener avec vous, vous devez en lâcher prise. Cela vous oblige à regarder très attentivement et très en détail ce qui dans cette vie a de la valeur, non seulement maintenant, mais aussi après que vous serez mort. Se rendre compte de cela oblige aussi à être vigilant. Vous devez être prêt à partir à tout moment. Ajahn Lee comparait souvent ce processus de se préparer à la renaissance au processus de se préparer pour un voyage, ou pour une migration forcée soudaine. Vous avez besoin de savoir ce qu’il est bon de prendre avec vous et ce qu’il vaut mieux laisser derrière, et conserver les choses dont vous avez vraiment besoin à portée de main. C’est comme quand vous allez faire du camping itinérant : si vous prenez trop de choses, cela pèse sur vous. Si vous n’en prenez pas assez, vous mourrez de faim et vous souffrirez d’autres épreuves. Vous devez donc savoir ce dont vous avez vraiment besoin[1].

[1] Extrait du Livret du Refuge n° 13 (www.refugebouddhique.com).


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Mark Epstein est un psychiatre et pratiquant bouddhiste qui a beaucoup étudié les liens entre le bouddhisme et la psychothérapie.

J’ai parlé à mon père de la vision bouddhiste de la mort alors qu’il avait 84 ans et qu’on venait de lui diagnostiquer une tumeur cérébrale invisible mais maligne. Mon père, médecin et professeur de médecine, ne s’intéressait à aucune de mes activités spirituelles. Il était un scientifique qui ne croyait pas en une vie après la mort. J’avais toujours évité de lui parler du bouddhisme, mais j’ai soudain réalisé que j’avais un conseil que je n’avais jamais donné.

« Tu connais ce sentiment de toi-même au fond de toi qui n’a pas vraiment changé depuis que tu es un garçon ? » lui ai-je demandé. « La façon dont tu as ressenti la même chose pour toi-même en tant que jeune homme, à l’âge mûr, et même maintenant ? C’est une sorte de vérité : tu sais ce que c’est, mais il est difficile de mettre le doigt dessus. Il suffit de détendre ton esprit dans cette sensation et de la traverser. Le corps se détériore, mais tu peux te reposer dans ce que tu as toujours été. » Mon père a été étonnamment réceptif.[2]

[2] Extrait de l’article « Already Free », Mark Epstein, Tricycle, été 2019.



Cet article est paru dans Sagesses Bouddhistes n°22 (Été 2022).


 


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